Littérature

Toutes blessent, la dernière tue de Karine Giebel : Trop c’est trop

C’est toujours gratifiant quand on te demande de lire un roman, afin d’avoir un « œil expert” sur la violence d’une histoire et c’est ce qu’il m’est arrivé avec Toutes blessent, la dernière tue de Karine Giebel publié aux Editions Belfond.

La violence est quelque chose de difficile à doser dans un roman, au même titre que les effets horrifiques dans la littérature fantastique. Ne pas assez en faire ou justement trop en faire ? Il n’y a jamais assez de violence selon moi, mais à condition que celle-ci soit totalement justifiée.

Malheureusement, trop c’est trop pour Toutes blessent, la dernière tue… Mais je vais vous dire pourquoi. 

La 4eme de couverture

Maman disait de moi que j’étais un ange. 

Un ange tombé du ciel. 

Mais les anges qui tombent ne se relèvent jamais…
Je connais l’enfer dans ses moindres recoins.
Je pourrais le dessiner les yeux fermés.
Je pourrais en parler pendant des heures.
Si seulement j’avais quelqu’un à qui parler…

Tama est une esclave. Elle n’a quasiment connu que la servitude. Prisonnière de bourreaux qui ignorent la pitié, elle sait pourtant rêver, aimer, espérer. Une rencontre va peut-être changer son destin… 

Frapper, toujours plus fort.
Les détruire, les uns après les autres.
Les tuer tous, jusqu’au dernier.

Gabriel est un homme qui vit à l’écart du monde, avec pour seule compagnie ses démons et ses profondes meurtrissures. 
Un homme dangereux. 
Un matin, il découvre une inconnue qui a trouvé refuge chez lui. Une jeune femme blessée et amnésique. 
Qui est-elle ? D’où vient-elle ? 

Rappelle-toi qui tu es. Rappelle-toi, vite !
Parce que bientôt, tu seras morte.

Toutes blessent, la dernière tue : Trop c’est trop

Vous le savez certainement, mais l’abolition de l’esclavage en France date de 1848. Une date que l’on oublie bien trop souvent, un passé que l’on occulte assez facilement tout de même. Mais savez-vous qu’il aura fallu attendre la date du 05 août 2013 pour qu’une loi soit mise en place, afin que la réduction en esclavage, la servitude et le travail forcé fassent leur entrée dans le code pénal ? Alors, ça c’est sur le papier, car dans Toutes blessent, la dernière tue, Karine Giebel nous balance une vérité en pleine poire. La servitude existe encore aujourd’hui, sous diverses formes. Elle est cachée dans l’ombre des villas ou des barres d’HLM.

Karine Giebel nous livre ici un roman poignant, violent et à fleur de peau. Si vous avez apprécié Meurtres pour rédemption, vous aimerez également celui-ci, bien que la thématique ne soit pas exactement la même. Toutes blessent, la dernière tue sera certainement un roman qui restera gravé en vous, tant le récit se veut humain, dérangeant de par son histoire et surtout révoltant. Vous n’allez pas être indifférent à ce que l’autrice nous propose dans cette histoire. Karine Giebel a bien compris que l’on peut se servir du thriller psychologique et du roman noir pour dénoncer quelque chose. Je ne vous cache pas qu’il faudra avoir le cœur bien accroché, tant ce roman est vraiment très noir, voire inconcevable par moment. Karine Giebel n’y va pas de main morte, mais je reviendrais sur cet aspect par la suite.

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Vous l’aurez compris, Karine Giebel va nous parler de l’esclavage moderne, qui sera incarné par Tama. Les riches profitent de la pauvreté pour acheter quelqu’un à l’étranger, pour l’asservir et le faire travailler à son compte. L’autrice ne nous laisse aucun moyen de nous échapper, puisque nous suivons Tama depuis son achat, alors qu’elle n’est qu’une enfant. Elle sera jetée dans une famille française, sans savoir lire, ni écrire… Cette enfant sera la boniche, le souffre douleur. Elle va devoir subir la violence physique, mais aussi psychologique. Elle ne quitte pas la maison, n’a le droit qu’à un matelas dans le débarras. Elle doit faire face à la violence des parents, de l’appétit sexuel de l’homme de la maison et du sadisme des autres. Il n’y a aucun retournement de situation dans cette histoire. Tama s’enfonce et nous entraîne avec elle dans un labyrinthe de violence, une spirale infernale dont il sera difficile d’en voir le bout.
Karine Giebel va également traiter d’un autre aspect, qui peut s’apparenter à celui de l’esclavagisme, avec l’idée de relation toxique. Si l’idée est bonne de faire ce parallèle ci, force est de constater que ça ne prend pas forcément dans cette histoire. Je comprends que Tama est une jeune femme qui ne connaît pas grand-chose à la vie, sauf la violence des Hommes, mais il est difficile de croire qu’elle n’a pas envie de s’enfuir de ce genre de relation, mais bref passons sur cet aspect. 

Toutes blessent, la dernière tue est un pur roman de Karine Giebel. L’autrice nous fait part de sa plume unique. Dès les premiers mots, le choc arrive. Sa plume nous assomme, nous envoi au tapis, tout en nous offrant des moments de grâce où il est possible de respirer, afin de reprendre espoir. Le premier tiers est incroyable de maîtrise tant au niveau de la narration, que de la montée progressive de la violence. On sent que Karine Giebel vit son roman, déploie toute sa passion dans ses mots. Encore une fois, l’autrice met en avant la folie des Hommes, la violence qui habite en eux. L’Homme est capable du pire et ce n’est pas l’accumulation de scènes violentes qui nous fera dire le contraire. Mais, c’est ici que le problème arrive pour moi…

Si on découvre Karine Giebel, alors ce roman aura l’effet d’une claque. Si on apprécie un peu son travail, alors ce roman sera comme une petite bombe. Si on est déjà un grand fan de l’autrice, alors ce roman saura nous toucher et on aura ce que l’on veut. Par contre, si on était déjà réticent à l’autrice, alors cette histoire n’arrangera rien du tout. 
Je suis le cul entre deux chaises avec ce Toutes blessent, la dernière tue. J’ai l’impression que Karine Giebel a un concept de plat unique. Toujours le même déroulé, le même genre de personnage, mais avec un assaisonnement différent. Oui, c’est violent et touchant, mais il n’y a plus de surprises et je dirais même que cela en devient gratuit et lassant.
Le problème majeur vient de cette accumulation de violence qui devient gratuite. Oui, c’est important de dénoncer ce type de comportement, de mettre en lumière ce trafic d’êtres humains. Mais est-ce vraiment utile d’en faire autant ? De multiplier les scènes chocs, seulement pour heurter son lecteur ? Je retrouve ce que j’avais reproché à l’autrice durant ma lecture de Meurtres pour rédemption. On tourne en rond et cela n’apporte plus rien au final.  


Toutes blessent, la dernière tue est un page turner au goût de trop et de déjà vu. L’histoire est poignante, incroyablement forte et violente, mais la sauce ne prend  plus avec l’autrice. Celle-ci nous ressort le même roman, mais avec une thématique différente et c’est vraiment dommage, tant sa plume est unique…

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18 réponses »

  1. J’ai devoré ce livre, en me disant que c’etait quand meme extremement violent, puis je me suis posée la question « à quoi sert ce livre? Que m’apporte-t-il? » Ma reponse etait… rien… et à partir de là, Tama m’a.soulé, j’en avais marre, resultat, j’ai ete ultra blazée par ce livre…

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    • J’ai eu le même ressenti durant ma lecture, surtout quand Tama est « libéré », mais qu’elle finit dans une relation toxique où la violence est toujours omniprésente… C’est là où je me suis dit que Giebel en faisait trop, au point de rendre son message mauvais…

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    • Ça fait plaisir finalement de ne pas être le seul a avoir eu ce ressenti 😉. Ah oui, l’autrice est merveilleuse. Une plume magistrale, unique et qui te colle à ton siège pendant 600 pages…

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  2. Je suis rarement déçue avec cette auteure même si j’aime moins se dernières parutions. J’ai pas encore remarqué une redondance dans ses histoires et on m’a très bien vendu ce livre à sa sortie. Je verrai par moi-même ce que ça donne, j’ai lu dernièrement Purgatoire des innocents qui était déjà très violent et je l’ai beaucoup apprécié.

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  3. J’aime beaucoup Karine Giebel, car elle y va fort dans ses livres, mais j’avoue que je laisse passer pas mal de temps entre deux de ses livres 😁

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      • J’ai le même soucis avec Thilliez, j’ai lu quasi tous ces livres à la suite, et depuis Atomka, je n’y arrives plus. J’ai l’impression que les ressorts scénaristique sont toujours les mêmes. Résultat, ça fait des années que je ne n’ai pas lu un de ces livres (hormis des nouvelles ici et là)

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        • Et bien tu vois je n’ai pas absolument pas ce soucis avec Thilliez car chaque roman est différent dans son approche narative. Il y a toujours un changement de ton dans ce qu’il propose. Il passe du calme de la vie, à l’urgence absolu dans Pandemia 🙂. Je ne dis pas pour les one shot où il est parfois moins inspiré 😉

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          • Décidément on ne perçois pas les choses de la même manière, car moi, je suis ressorti un peu lassé de sa continuité Sharko/Henebelle. Je préfère ses One-Shot, comme Vertige par exemple. Là, j’ai Puzzle de coté, pour quand je voudrais me relancer dans Thilliez ^^
            (bon, il faut dire que lire tous les Sharko/Henebelle dans l’ordre et dans la même année, ça a du jouer pour ma lassitude. Je crois que dans la continuité, le prochain que je dois lire, c’est Angor.)

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          • Franchement je te conseille de continuer sur la saga rien que pour Pandemia qui est aussi extraordinaire que Rêver 😇.
            Par contre, Puzzle est l’un de ses plus mauvais, enfin selon moi. J’ai eu l’impression de lire un plagiat d’un très célèbre roman ainsi que d’un film d’horreur des années 2000…

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